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[1648] MÉMOIRES

ce pernicieux dessein ; qu’il ne pouvoit s’empêcher de représenter à la compagnie la nécessité qu’il croyoit qu’il y avoit à supplier très-humblement la Reine de ramener le Roi à Paris ; et d’autant que l’on ne pouvoit ignorer qui étoit l’auteur de tous ces maux, de prier M. le duc d’Orléans et les officiers de la couronne de se trouver au parlement pour y délibérer sur l’arrêt donné en 1617, à l’occasion du maréchal d’Ancre, par lequel il étoit défendu aux étrangers de s’immiscer dans le gouvernement du royaume. Cette corde nous avoit paru à nous-mêmes bien grosse à toucher ; mais il ne la falloit pas moindre pour réveiller, ou plutôt pour tenir éveillés, des gens que la peur eût très-facilement jetés dans l’assoupissement. Cette passion ne fait pas pour l’ordinaire cet effet sur les particuliers : mais j’ai observé qu’elle le fait sur les compagnies très-souvent. Il y a même raison pour cela ; mais il ne seroit pas juste d’interrompre, pour la déduire, le fil de cette histoire.

Le mouvement que la proposition de Viole fit dans les esprits est inconcevable. Elle fit peur d’abord, elle réjouit ensuite ; elle anima après. L’on n’envisagea plus le Roi hors de Paris que pour l’y ramener : l’on ne regarda plus les troupes que pour les prévenir. Blancménil, qui m’avoit paru le matin comme un homme mort, nomma en propres termes le cardinal, qui n’avoit jusque là été désigné que sous le titre de ministre. Le président de Novion éclata contre lui en termes fort injurieux ; et le parlement donna même avec gaieté un arrêt par lequel il étoit ordonné que très-humbles remontrances seroient faites à la Reine, pour la supplier de ramener le Roi à Paris, et de faire