Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/200

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
198
MÉMOIRES

qui portoit, en termes même injurieux, cassation de celui d’union des quatre compagnies. Le parlement ayant délibéré ne répondit rien à cet arrêt du conseil, que par un avis donné solennellement aux députés des trois autres compagnies de se trouver le lendemain, à deux heures de relevée, dans la salle de Saint-Louis.

La cour, outrée de ce procédé, s’avisa de l’expédient du monde le plus bas et le plus ridicule, qui fut d’avoir la feuille de l’arrêt. Du Tillet, greffier en chef, auquel elle l’avoit demandée, ayant répondu qu’elle étoit entre les mains du greffier commis : Le Plessis-Guénégaud, et Carnavalet, lieutenant des gardes du corps, le mirent dans un carrosse, et l’amenèrent au greffe pour la chercher. Les marchands s’en aperçurent, le peuple se souleva ; et le secrétaire et le lieutenant furent très-heureux de se sauver. Le lendemain, à sept heures du matin, le parlement eut ordre d’aller au Palais-Royal, et d’y porter l’arrêt du jour précédent, qui étoit celui par lequel le parlement avoit ordonné que les autres compagnies seroient priées de se trouver à deux heures dans la chambre de Saint-Louis. Comme ils furent arrivés au Palais-Royal, M. Le Tellier[1] demanda à M. le premier président s’il avoit apporté la feuille ; et le premier président lui ayant répondu que non, et qu’il en diroit les raisons à la Reine, il y eut dans le conseil des avis différens. L’on prétend que la Reine étoit assez portée à arrêter le parlement ; mais personne ne fut de cet avis, qui à la vérité n’étoit pas soutenable, vu la disposition des peuples. L’on prit un parti plus mo-

  1. Michel Le Tellier, mort chancelier de France en 1685. (A. E.)