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DU CARDINAL DE RETZ.

tion, qui fut prise d’un consentement général dans les conversations particulières, fut portée innocemment et sans aucun mystère dans l’assemblée, où l’on ne songea pas seulement que la cour y pût faire réflexion ; et il arriva par hasard que lorsqu’on y délibéra, le tour, qui tomba ce jour-là sur la province de Paris, m’obligea à parler le premier. J’ouvris donc l’avis, suivant que nous l’avions concerté ; et il fut suivi de toutes les voix. À mon retour chez moi, je trouvai l’argentier de la Reine qui me portoit ordre de l’aller trouver à l’heure même. Elle étoit sur son lit dans sa petite chambre grise, et elle me dit avec un ton de voix fort aigre, qui lui étoit assez naturel, qu’elle n’eût jamais cru que j’eusse été capable de lui manquer au point que je venois de le faire dans une occasion qui blessoit la mémoire du feu Roi son seigneur. Il ne me fut pas difficile de la mettre en état de ne pouvoir que me dire sur mes raisons. Elle sortit d’embarras, par le commandement qu’elle me fit de les aller faire connoître à M. le cardinal ; mais je trouvai qu’il les entendoit aussi peu qu’elle. Il me parla de l’air du monde le plus haut ; il ne voulut point écouter mes justifications ; et il me déclara qu’il me commandoit de la part du Roi que je me rétractasse le lendemain en pleine assemblée. Vous croyez bien qu’il eût été difficile de m’y résoudre : je ne

    des princes souverains. Cela est d’autant plus à reprendre en ces messieurs, qu’ils ne pouvoient pas ignorer l’arrêt qui avoit été donné pour ce sujet contre M. le nonce en 1647, le 15 mai. M. Talon s’en souvint bien mieux en une rencontre semblable, le 6 mai 1665, qui est le jour d’un arrêt qu’il fit donner sur la même chose. Le nonce l’ayant encore entrepris six semaines après, nouvel arrêt du 23 juin. Cette note est tirée des Mémoire manuscrits de Colbert. ( A. E.)