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MÉMOIRES

que la pratique fait connoître quelquefois, et que la spéculation ne fait jamais entendre. J’en ai remarqué de cette sorte en tous genres d’affaires.

Je continuai à faire dans le diocèse tout ce que la jalousie de mon oncle me permit d’y entreprendre sans le fâcher ; mais comme de l’humeur dont il étoit il y avoit peu de choses qui ne le pussent fâcher, je m’appliquai bien davantage à tirer du mérite de ce que je n’y faisois pas que de ce que je faisois ; et ainsi je trouvai le moyen de prendre même des avantages de la jalousie de M. de Paris, en ce que je pouvois à jeu sûr faire paroître ma bonne intention en tout : au lieu que si j’eusse été le maître, la bonne conduite m’eût obligé à me réduire purement à ce qui eût été praticable.

M. le cardinal Mazarin m’avoua long-temps après, dans l’intervalle de l’une de ces paix fourrées que nous faisions quelquefois ensemble, que la première cause de l’ombrage qu’il prit de mon pouvoir à Paris fut l’observation qu’il fit de cette manœuvre, qui étoit pourtant à son égard très-innocente. Une autre rencontre lui en donna avec aussi peu de sujet. J’entrepris d’examiner la capacité de tous les prêtres du diocèse : ce qui étoit dans la vérité d’une utilité inconcevable. Je fis pour cet effet trois tribunaux[1] composés de chanoines, de curés et de religieux, qui devoient réduire tous les prêtres en trois classes, dont la première étoit des capables, que l’on laissoit dans l’exercice de leurs fonctions ; la seconde, de ceux qui ne

  1. Je fis pour cet effet trois tribunaux : L’exécution de ce dessein fut principalement confiée aux jansénistes, avec lesquels le coadjucateur avoit dès lors d’étroites liaisons.