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DU CARDINAL DE RETZ.

égayées par d’autres qui étoient un peu plus divertissantes : mais elles n’en étoient pas assurément déparées. La bienséance y étoit observée en tout, et le peu qui y manquoit étoit suppléé par mon bonheur, qui fut tel que tous les ecclésiastiques du diocèse me souhaitoient pour successeur de mon oncle, avec une passion qu’ils ne pouvoient cacher. M. le cardinal de Richelieu étoit bien éloigné de cette pensée : ma maison lui étoit fort odieuse, et ma personne ne lui plaisoit pas, par les raisons que je vous ai touchées ci-dessus. Voici deux occasions qui l’aigrirent encore bien davantage.

Je dis à feu M. le président de Mesmes[1], dans la conversation, une chose assez vraisemblable, quoique contraire à ce que je vous ai dit quelquefois, qui est que je connois une personne qui n’a que de petits défauts, mais qu’il n’y a aucun de ces défauts qui ne soit l’effet ou la cause de quelques bonnes qualités. Je disois donc au contraire, à M. le président de Mesmes, que M. le cardinal de Richelieu n’avoit aucune grande qualité qui ne fût l’effet ou la cause de quelques grands défauts. Ce mot, qui avoit été dit tête à tête dans un cabinet, fut redit je ne sais par qui à M. le cardinal, et il fut redit sous mon nom : jugez de l’effet ! L’autre chose qui le fâcha fut que j’allai voir M. le président Barillon[2], qui étoit prisonnier à Amboise, pour des remontrances qui s’étoient faites au parlement, et que j’allai voir dans une circonstance qui fit remarquer mon voyage. Deux misérables

  1. Le président de Mesmes : Henri, frère du comte d’AVaux, mort en 1650.
  2. Jean-Jacques Barillon, président aux enquêtes, mort prisonnier à Pignerol en 1645. (A. E.)