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DU CARDINAL DE RETZ.

la compagnie qui les joignoit du côté de Montmartre, et y avoit beaucoup plus de crédit que le capitaine, qui d’ailleurs étoit son beau-frère. Parmentier, qui par l’esprit et par le cœur étoit aussi capable d’une grande action qu’homme que j’aie jamais connu, m’assura qu’il disposeroit à coup sûr de Brigalier, conseiller à la cour des aides, capitaine de son quartier, et très-puissant dans le peuple. Mais il m’ajouta en même temps qu’il ne falloit lui parler de rien, parce qu’il étoit léger et sans secret.

M. le comte m’avoit fait toucher douze mille écus par les mains de Duneau, l’un de ses secrétaires, sous je ne sais quel prétexte. Je les portai à ma tante de Maignelay, en lui disant que c’étoit une restitution qui m’avoit été confiée par un de mes amis à sa mort, à condition de l’employer moi-même au soulagement des pauvres qui ne mendioient pas ; que comme j’avois fait serment sur l’Évangile de distribuer moi-même cette somme, je m’en trouvois extrêmement embarrassé, parce que je ne connoissois pas les gens ; et que je la suppliois de vouloir bien en prendre le soin. Elle en fut ravie : ellee me dit qu’elle le feroit très-volontiers ; mais que comme j’avois promis de faire moi-même cette distribution, elle vouloit absolument que j’y fusse présent, et pour demeurer fidèlement dans ma parole, et pour m’accoutumer moi-même aux œuvres de charité. C’étoit justement ce que je demandois, pour avoir lieu de me faire connoître à tous les nécessiteux de Paris ; ainsi je me laissois tous les jours comme traîner par ma tante dans les faubourgs et dans les greniers, et je voyois très-souvent chez elle des gens bien vêtus, connus