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teuse crainte, ou engagé par un intérêt servile ; et cependant vous ne tombez pas dans cette bassesse générale : vous soutenez ces nobles sentimens que votre illustre naissance vous inspire, et votre esprit forme des entreprises dignes de votre valeur. Ne négligez donc point ces qualités admirables, n’abusez point des grâces que la nature vous a faites : servez votre patrie ; jugez, par la beauté de vos inclinations, de la grandeur des actions qu’elles peuvent produire : songez qu’il ne faut qu’un homme seul de votre condition et de votre mérite pour redonner cœur aux Génois, et les enflammer du premier amour de la liberté. »

L’abbé de Gondy place ensuite dans la bouche de Verrina les maximes d’après lesquelles il se proposoit lui-même de diriger sa conduite.

« Je conçois qu’une ame aussi délicate que la vôtre et aussi jalouse de la gloire aura peine à souffrir de se voir ternie par ces mots terribles de rebelle, de factieux et de traître. Cependant ces fantômes d’infamie que l’opinion publique a formés pour épouvanter les âmes du vulgaire ne causent jamais de honte à ceux qui les portent pour des actions éclatantes, quand le succès en est heureux. Les scrupules et la grandeur ont été de tout temps incompatibles, et ces foibles prétextes d’une prudence ordinaire sont plus propres à débiter à l’école du peuple qu’à celle des grands seigneurs. Le crime d’usurper une couronne est si illustre, qu’il peut passer pour une vertu ; chaque condition des hommes a sa réputation particulière : l’on doit estimer les petits pour la modéra-