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d’avoir voulu que le Havre fut entre les mains du duc de Richelieu son ami, puisque le ministre l’avoit fait espérer au duc de Longueville son beau-frère, par la seule considération de la grandeur de sa maison ; et quand M. le prince se fâcha du mariage du duc de Mercœur, le cardinal disoit de même qu’il avoit premièrement recherché de s’allier avec lui par le mariage de son neveu avec sa parente, et qu’il l’avoit refusé.

Les serviteurs et les amis des princes, les voyant arrêtés, se sauvèrent dans les places où ils commandoient avec le plus de diligence qu’il leur fut possible. Le duc de Bouillon et le vicomte de Turenne furent les premiers à prendre la fuite. On les manqua seulement de quelques momens, eux et le prince de Marsillac. Selon la résolution de la Reine, ils dévoient avoir la même destinée ; mais ils furent avertis de bonne heure. Le vicomte de Turenne se retira à Stenay, qui appartenoit au prince de Condé : et le président Pérault, intendant de sa maison et de ses affaires, fut mené ensuite au bois de Vincennes.

Le soir de ce jour si célèbre, la Reine, se montrant à toute la cour, parla du prince de Condé avec une grande modération. Elle dit à tous qu’elle étoit fâchée d’avoir été forcée, pour le repos de l’État, de le faire arrêter, vu son mérite, sa naissance et ses services ; mais que les intérêts du Roi l’avoient emporté par dessus ces considérations. Elle reçut froidement madame de Montbazon, qui vint lui faire ses complimens avec l’emportement qu’on a d’ordinaire pour ce qui plaît. La Reine lui dit qu’elle n’étoit pas capable de sentir de la joie d’une chose de cette nature ; qu’elle