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parlement de Rouen et beaucoup de personnes de qualité eussent eu assez de disposition pour faire du bruit en faveur de cette princesse frondeuse ; mais le marquis de Beuvron, ancien ami du duc de Longueville, quoique peut-être malgré lui, se résolut de faire son devoir ; et lui ayant montré clairement qu’il ne la pouvoit servir, lui fit connoître qu’elle n’en devoit pas attendre grand secours. Madame de Longueville, se voyant mal reçue, résolut de s’en aller à Dieppe, à dessein de chercher en ce lieu quelque soulagement. Beaucoup de gentilshommes du pays la furent visiter ; ils lui menèrent quelques soldats, et d’autres lui offrirent et lui prêtèrent de l’argent. Le prince de Marsillac l’avoit déjà quittée pour aller en Touraine, à son gouvernement, travailler à former un parti en ce pays, où il étoit puissant par ses amis et par son crédit. Il ne resta auprès d’elle de personnes importantes et de qualité que Saint-Ibal, Traci et Bavière, avec un certain Saint-André, fort habile pour les fortifications. Il y eut aussi quelques provinciaux de conséquence qui ne l’abandonnèrent pas. Elle eut dessein de se tenir dans cette place tant qu’il lui seroit possible ; et si le Roi l’en chassoit, de se mettre dans un vaisseau, et d’aller chercher dans les pays étrangers, à l’exemple de madame de Chevreuse, le refuge que les malheureux y trouvent toujours.

Montigny, gouverneur de Dieppe, et homme de bien, en recevant madame de Longueville ne laissa pas d’envoyer assurer la Reine de sa fidélité. Le marquis de Beuvron en avoit fait autant. En cela il étoit louable. Tous deux avoient de grandes obligations au duc de Longueville ; et, dans une pareille conduite,