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choses, et firent appréhender à la cour quelque commencement de désordre et de brouillerie.

Le lendemain de cette assemblée [le 22 mai 1644], on envoya commander an président Barillon et au président Gavant, et à quelques autres de même cabale, de se retirer. Le président Barillon étoit honnête homme et fort estimé : il avoit servi la Reine dans le parlement, où il avoit beaucoup de crédit et de réputation. Les importans étoient de ses amis : lui et eux avoient été serviteurs de la Reine, et ne l’étoient plus. On l’envoya à Pignerol, au grand déplaisir de beaucoup d’honnêtes gens, où il mourut un an après, regretté de tout le monde. Il étoit homme d’honneur[1], mais de ces gens chagrins qui haïssent toujours ceux qui sont en place, et croient qu’il est d’un grand cœur de n’aimer que les misérables. J’ai ouï dire à la Reine que pendant la vie du feu Roi elle n’avoit pas eu de serviteur plus fidèle que ce président ; et qu’aussitôt qu’elle avoit été régente, il l’avoit abandonnée, et désapprouvé toutes ses actions. Quelque temps après cette disgrâce, ceux du parlement, mutinés de la rigueur qu’ils prétendoient avoir été faite à leur compagnie, firent plusieurs assemblées. Ils arrêtèrent de venir trouver la Reine pour se plaindre du mal qu’elle leur avoit fait, et résolurent d’y venir sans demander

  1. Il étoit homme d’honneur. Le manuscrit donne plus de développemens sur le caractère de Barillon. « Il étoit estimé homme d’honneur et généreux ; mais outre qu’il avoit un peu de chagrin de n’avoir pas eu de part à la faveur, il avoit un peu de cette teinture de quelques hommes de notre siècle qui haïssent toujours les heureux et les puissans. Ils estiment qu’il est d’un grand cœur de n’aimer que les misérables, et cela les engage incessamment dans les partis qui sont contraires à la cour. »