Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/75

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en temps, et ne voir que les personnes qui lui étoient plus familières et la pouvoient moins importuner. Dans les autres jours, elle donnoit facilement audience à tous ceux qui la lui demandoient, tant sur les affaires générales que sur les particulières. Comme elle avoit du bon sens et beaucoup de raison, elle les satisfaisoit tous par des réponses accompagnées de bonté ; et ceux qui l’aimoient auroient toujours voulu qu’elle eût agi par ses propres lumières, comme d’abord elle en avoit eu l’intention, pour éviter le blâme qu’elle avoit vu donner au feu Roi, qui avoit trop abandonné son autorité au cardinal de Richelieu ; disant souvent à ses serviteurs qu’elle n’en vouloit pas faire autant. Mais, par malheur pour ceux qui étoient à elle, ses résolutions furent affaiblies par le désir du repos, et par la peine qu’elle trouva dans la multiplicité des affaires qui sont inséparables du gouvernement d’un grand royaume. Dans la suite des temps, elle devint plus paresseuse, et apprit par son expérience que Dieu n’a pas placé des rois sur des trônes pour ne point agir, mais pour souffrir quelques-unes des misères qui sont attachées à toutes sortes d’états.

La Reine ne dînoit pas souvent en public servie par ses officiers, mais presque toujours dans son petit cabinet, servie par ses femmes. Après son dîner[1], elle alloit tenir le cercle, ou bien elle sortoit et alloit voir des religieuses, ou faire quelques dévotions ; d’où étant revenue, elle se donnoit encore quelque temps

  1. Après son dîner : « Au sortir de son dîner, dit le manuscrit, elle se retiroit un peu dans sa chambre, pour être quelque temps seule, et donnoit souvent une heure à Dieu par quelque lecture dévote qu’elle faisoit dans son oratoire. »