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sous le ministère du cardinal de Richelieu, qui étoient en grand nombre, et qui étoient difficiles à contenter. Dans cet intervalle de dégoût et d’embarras, le cardinal Mazarin, nommé par le feu Roi pour un de ceux de son conseil, fut assez heureux pour être destiné et ensuite choisi par elle pour remplir cette place. La Reine ne l’avoit point éloigné, parce qu’elle n’avoit point de haine contre lui ; et comme il étoit habile il sut gagner M. le prince, qui n’aimoit point les Vendômes, et mettre dans ses intérêts le favori du duc d’Orléans, qui n’étoit pas de leur parti. En même temps il acquit pour amis ceux qui étoient serviteurs de la Reine, sans être de la cabale de MM. de Vendôme, qui faisoient tant de bruit ; car il y en avoit qui n’en faisoient point, et qui n’étoient pas moins considérés, comme le marquis de Liancourt[1], le marquis de Mortemart, Beringhen, et milord Montaigu, un Anglais que la Reine connoissoit depuis long-temps : gens sages auxquels elle étoit accoutumée, et qui avoient toujours été attachés à son service. Les deux premiers

  1. Le marquis de Liancourt : Roger Du Plessis, duc de Liancourt. Il épousa Jeanne de Schomberg, qui l’entraîna dans les querelles du jansénisme. — Le marquis de Mortemart : Gabriel de Rochechouard, depuis duc de Mortemart. — Beringhen : Henri de Beringhen. Il devint premier écuyer de la petite écurie : son père avoit été très-attaché à Henri iv. — Milord Montaigu : c’étoit un gentilhomme catholique qui depuis peu s’étoit fait prêtre. Du temps du cardinal de Richelieu, il avoit été employé par la Reine dans beaucoup d’intrigues. Le manuscrit explique plus clairement les moyens qu’employa Mazarin pour parvenir à la faveur. « Il sut acquérir pour amis tous ceux qui étoient de la cour, et qui n’étoient point de cette cabale qui pour lors faisoit tant de bruit, dont se trouva M. de Liancourt, le marquis de Mortemart, Beringhen, et un certain Anglais nommé Montaigu, que la Reine connoissoit du temps de Buckingham, et qui avoit toujours conservé beaucoup de familiarité avec elle. Ces personnes, opposées à la faveur présente, qui étoient amis de M. de Chavigny, et qui étoient fort considérables, crurent qu’il leur étoit de grande conséquence de détruire ceux qui régnoient avec trop de faste, et d’établir un ministre auprès de la Reine qui leur dût sa grandeur, et qui pût sauver leur ami. De sorte qu’ils travaillèrent premièrement à garantir le cardinal de sa chute ; puis, l’ayant empêché de tomber, ils travaillèrent à l’établir dans l’esprit de la Reine. »