Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 34.djvu/382

Cette page a été validée par deux contributeurs.
380
NOTICE

Le château d’Ivry fut choisi pour la célébration du mariage : les futurs époux s’y rendirent ; mais, au grand étonnement de la cour et de la ville, lorsque tout étoit conclu, la cérémonie fut différée de trois semaines, sans motif apparent. On s’épuisa en conjectures : le bruit courut que Charles ii, roi d’Angleterre, qui conservoit alors peu d’espoir de rentrer dans ses Etats, avoit fait demander mademoiselle de Longueville ; que son père, ébloui de cette alliance, lui assuroit trois millions, mais que Mazarin s’y opposoit. Quoi qu’il en soit, le mariage fut enfin célébré. Les contemporains prétendent que la princesse pleura beaucoup pendant la cérémonie : ce qu’il y a de certain, c’est que le duc éprouva un tel saisissement qu’il tomba malade en sortant de l’église.

La nouvelle épouse avoit alors trente-deux ans : son mari ne put jamais entièrement se rétablir, et il mourut peu de temps après, le 2 janvier 1659. Quoique jeune encore, elle ne songea point à se remarier. Jouissant d’une grande fortune, elle adopta une vie plus retirée qu’auparavant, et ne prit part à aucune intrigue. Dans sa solitude, elle étoit souvent saisie d’admiration au récit des grands événemens qui signalèrent le règne de Louis xiv, depuis le moment où il voulut gouverner par lui-même ; et ce sentiment éclate de la manière la plus franche dans quelques passages de ses Mémoires. Habitant alternativement la capitale et ses terres, elle partagea ses loisirs entre la culture des lettres et l’administration de ses biens. Le soin qu’elle apportoit à surveiller ses gens d’affaires la fit passer pour avare, tandis qu’elle n’étoit que