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le boucher ne se contenta pas de la refuser simplement, mais le fit avec telle insolence, qu’il lui manda que, n’ayant jusqu’alors reçu aucun paiement de la viande qu’il lui avoit vendue, il n’en avoit plus qu’une à son service, dont, se conservant la propriété, il lui donneroit, si bon lui sembloit, l’usage, sans lui en rien demander. Cette femme hautaine et courageuse reçut cette injure avec tant d’indignation, qu’elle alla tuer celui de qui elle l’avoit reçue, en pleine boucherie, de quatre ou cinq coups de poignard. Après quoi ils se retirèrent à Tarascon.

Ils eurent trois fils et quatre filles de ce mariage : l’aîné fut appelé Luynes, le deuxième Cadenet, et le troisième Brante.

L’aîné fut page du comte du Lude ; à son hors de page il demeura avec lui, et le suivit quelque temps avec ses deux frères, qu’il y appela. Ils étoient assez adroits aux exercices, jouoient bien à la longue et courte paume et au ballon. M. de La Varenne, qui les connoissoit à cause que la maison du Lude est en Anjou, province d’où il est natif, et avoit le gouvernement de la capitale ville, les mit auprès du feu Roi, et fit donner à l’aîné quatre cents écus de pension, dont ils s’entretenoient tous trois : depuis il la leur fit augmenter jusqu’à douze cents écus. L’union étroite qui étoit entre eux les faisoit aimer et estimer ; le Roi les mit auprès de M. le Dauphin, en la bonne grâce duquel ils s’insinuèrent par une assiduité continuelle, et par l’adresse qu’ils avoient à dresser des oiseaux.

Le Roi, à mesure qu’il croissoit en âge, augmentant sa bienveillance envers l’aîné, il commença à se rendre considérable. Le maréchal d’Ancre, voyant