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SUR DU GUESCLIN.

appella son frère Olivier, les deux Mauny, le chevalier de la Houssaye, Guillaume de Launoy. Ce fut là qu’il assembla bien mille combattans, à la tête desquels il se mit, et, passant par Roncevaux, il entra dans l’Espagne, et s’alla raffraichir avec eux quelque temps dans sa comté de Molina.

De là, sans perdre temps, il se rendit à grandes journées devant Tolede, au camp du roy Henry, qui n’avoit pas encore beaucoup avancé le siège de la place, quoy qu’il eût avec luy le Besque de Vilaines et l’archevêque de la ville. La resistance des assiegez avoit été jusques là fort opiniâtre, parce que le gouverneur étoit tout à fait dans les intérêts du roy Pierre, et quand il sortoit de la citadelle pour parler aux bourgeois, il prenoit si bien ses précautions auprès d’eux, qu’avant de descendre dans la ville, il luy falloit donner en otage cinq ou six des principaux de Tolede, parce qu’il apprehendoit qu’ils ne se saisissent de sa personne, et ne l’obligeassent à se rendre. Pierre étoit cependant à Seville, où il s’étoit retiré depuis son retour du royaume de Belmarin. Ce malheureux prince y étoit allé dans le dessein d’en tirer du secours dans la décadence de ses affaires, et, pour l’obtenir, il ne rougit point de faire deux infemes demarches. La première ce fut l’alliance qu’il n’eut point de scrupule de contracter avec un roy infidelle ; la seconde, ce fut la promesse qu’il fit de renier la foy même de Jésus-Christ, si l’on luy donnoit du secours. On s’obligea, soûs ces deux étranges conditions, de luy mener dix mille Sarrazins pour faire lever le siège de Tolede. Les assiegez, sur l’avis qu’ils en eurent, se proposerent de se partager en deux ; que la moitié