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SUR DU GUESCLIN.

L’un des fuyards vint tout éperdu donner avis au prince de Belmarin que, dans cette déroute, on avoit assommé son cousin germain. Cette nouvelle le desola fort. La rage qu’il en eut le fit jetter tout au travers de tous les dangers, pour venger, s’il pouvoit, cette mort sur le Besque de Vilaines, qui sans s’épouventer de cette furieuse temerité la luy fit payer cherement ; car se presentant à luy pour luy tenir tête, il luy donna tant de coups et de si pesans sur le casque, que, sa tête en devenant tout étourdie, l’homme en tomba pâmé sur la place. Une foule de Sarrazins coururent à luy pour le secourir et le relever, et l’envelopperent, de peur que, ne se pouvant plus tenir sur ses pieds, on ne l’achevât. Le dépit qu’ils eurent de voir leur maître abbattu leur fit tourner tête contre le Besque, qui les soutint avec une valeur extraordinaire. Mais il auroit à la fin succombé sous la multitude, si Bertrand ne fût venu le dégager et se joindre à luy dans le reste du combat ; si bien qu’ils ne faisoient eux deux qu’un seul corps de troupes, avec lequel ils chargèrent les sarrazins avec un courage invincible. Bertrand crioit à haut voix Guesclin ! pour donner chaleur à la mêlée. Ses Bretons, à ce signal redoubloient leurs coups et faisoient des efforts incroyables pour seconder leur general. Le Besque de son côté payoit aussi fort bien de sa personne, encourageant ses soldats à bien faire par son exemple. Il avoit à ses côtez un de ses fils qui se signaloit beaucoup dans cette bataille, et qui donna tant de preuves de son courage et de sa valeur, que le roy Henry le fit chevalier tout au milieu de l’action.

Ce prince, qui ne s’endormoit pas tandis que Ber-