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ANCIENS MÉMOIRES

seront déconfits et tous nôtres. Il fit aussitôt sonner ses trompettes avec un très grand bruit, et le Besque de Vilaines fit aussi de son côté la même contenance. Ils donnerent tous deux contre les sarrazins. Henry se chargea d’attaquer Pierre son ennemy, se promettant bien de le joindre dans la mêlée, pour le combattre corps à corps et vuider tout leur differend aux dépens de la vie de l’un ou de l’autre. Comme on étoit sur le point d’en venir aux mains, tous les soldats des deux armées se disoient adieu les uns aux autres, et faisoient leurs prieres en se frappant la poitrine, et se recommandans à Dieu dans un peril si présent et si eminent.

La bataille s’ouvrit par les gens de trait des deux côtez. Quand cette grêle qui dura quelque temps eut cessé, l’on s’approcha de plus prés, et l’on combattit pied à pied, le sabre et l’épée à la main. Le Besque de Vilaines[1] ayant descendu de cheval avec tout son monde, qui suivit son exemple, se mêla dans la presse tête baissée, pour aller chercher le neveu du roy de Belmarin, sur lequel il s’acharna particulièrement, et luy déchargea sur la tête un si grand coup d’une hache qu’il tenoit à deux mains, qu’il le renversa mort ; et poussant toûjours sa pointe, il fit une grande boucherie des sarrazins, dont il coucha par terre la premiere ligne, et écarta le reste bien loin.

  1. Moult estoit le Besgue de Villaines bien armé, et tout à pié estoit, et ses gens aussi, l’escu au col, et le glaive ou poing : dont il fey un paien, nepveu du roy de Belmarin, si raidement, qu’il le perça tout oultre, et toutes ses armures, et le rua jus tout mort : puis retira son glaive, et en occist aussi le second et le tiers, en escriant : « Nostre Dame aye au roy Henry. ! Huy verra l’en qui aquerra houneur. » (Ménard, p. 357.)