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SUR DU GUESCLIN.

roy de Belmarin de se surpasser dans cette occasion, le priant d’affronter comme luy tous les perils dans cette journée, parce que, s’il pouvoit une fois vaincre Henry, la couronne d’Espagne seroit affermie sur sa tête pour toute sa vie. Le jeune prince l’assûra par avance de la victoire, étant tous deux incomparablement plus forts que leurs ennemis, qui n’étoient pas deux contre cinq.

Tandis qu’ils s’échauffoient l’un l’autre à bien faire, un capitaine sarrazin les interompit en disant qu’il ne dévoient point douter du succés du combat qu’ils alloient donner, et que le corps de troupes qu’il commandoit n’ayant jamais pâly devant les chrétiens, et ne sachant ce que c’étoit que de reculer, il leur répondoit de la victoire, et qu’Henry leur feroit bientôt voir ses talons. Pierre ne parut pas bien persuadé de tous ces avantages dont il se flattoit, lui representant qu’il y avoit avec Henry deux intrepides chevaliers, Bertrand et le Besque de Vilaines, dont le premier avoit pour armoiries un aigle de sable en champ d’argent, et le second arboroit dans ses enseignes un quartier d’Espagne, à cause de la comté de Ribedieu, dont Henry luy avoit fait présent ; que ces deux generaux ne fuiroient jamais et vendroient chèrement leur vie ; que s’ils pouvoient tomber prisonniers dans ses mains, il ne leur donneroit jamais la liberté pour quelque rançon qu’ils luy voulussent offrir. Aprés qu’il eut achevé ce discours, le jeune prince de Belmarin fit faire un mouvement à ses troupes qu’il fit marcher droit à Bertrand, qui, les voyant venir, dit à ses gens : Orsus, mes amis, vecy ces gars qui viennent, et par Dieu qui peina en croix et le tiers jour suscita, ils