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SUR DU GUESCLIN.

jusqu’aux pieds, la reine entra comme en triomphe dans Burgos, suivie d’un cortege fort magnifique, accompagnée d’une cavalcade fort leste. Mais ce qui fit naître encore une plus grande veneration pour elle, ce fut la majesté de son visage et ce grand air de reine, qu’elle tenoit encore plus de la nature que de sa qualité. Toutes les dames de Burgos avoient arboré leurs plus beaux ornemens pour se presenter devant elle et luy faire leur cour. Elles la feliciterent sur la justice que le ciel luy faisoit de la faire monter sur le trône, dont elle n’étoit que trop digne, et l’assûrerent qu’elles feroient de leur mieux pour luy plaire, et qu’elles travailleroient par tout à luy donner des preuves de leur obeïssance et de leur zèle. La Reine leur repondit qu’elle feroit si bien qu’elles auroient tout sujet de se loüer d’elle. En suite elle se rendit au palais, qu’elle trouva fort superbement paré, dont toutes les chambres étoient tenduës de fort rares tapisseries et de riches draps d’or et de soye.

Le saint jour de Pâques fut choisy pour le couronnement de Leurs Majestez, qui fut suivy d’un fort grand banquet. Les concerts, les voix et d’autres instrumens de musique en rendoient le repas encore plus agreable. Le comte de la Marche, aprés que toutes ces rejoüissances eurent pris fin, se souvenant que la reine Blanche de Bourbon avoit reçu la sepulture dans une église qui n’étoit pas fort loin de là, fit celebrer plusieurs messes dans le même lieu pour le repos de l’ame de cette princesse ; et par ce lugubre devoir, il ralluma dans l’ame de Bertrand et de tous les François le juste désir de venger sur Pierre un si cruel meurtre, et de n’en pas demeurer à ces premiers suc-