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ANCIENS MÉMOIRES

et de tous ces seigneurs, et chacun luy rendit la pareille à l’instant. Le chevalier Thomas de Cantorbie fut bien déconcerté, quand il vit Bertrand dans la tente du Duc, à qui toute la Cour faisoit des honnêtetez, et qui se plaignoit hautement du violent procédé qu’il venoit de tenir à l’égard de son frère, contre la bonne foy de la trêve et le droit des gens. Le Duc, sans donner le loisir au chevalier Thomas de répondre, luy commanda de remettre entre les mains de Bertrand son frère Olivier sans aucune rançon, parce qu’il n’avoit pas été de prise durant la surséance d’armes.

Le chevalier, tout à fait indigné des grosses paroles que Bertrand luy avoit attiré de son general, répondit fièrement qu’il étoit homme d’honneur et gentilhomme sans reproche, et qu’il le soûtiendroit au péril de sa vie contre ce Guesclin, qui luy venoit de faire cette affaire : et pour preuve de ce qu’il assuroit, il jetta son gant par terre, comme un gage du combat qu’il étoit prêt de faire avec celuy qui seroit assez hardy pour le relever. Bertrand voyant que celuy-cy le vouloit braver, ramassa le gant aussitôt, et prenant tout en colère Thomas par la main, luy dit qu’il vouloit se couper la gorge avec luy, prétendant prouver par le succés du combat qu’il étoit un lâche et un malhonnête homme d’en avoir usé si mal avec son frere Olivier, qu’il n’avoit pas pris de bonne guerre. Le chevalier, sans s’étonner, luy répondit qu’il ne se coucheroit point qu’ils n’eussent auparavant mesuré leurs épées ensemble. Et moy, luy dit Bertrand, oncques ne mangeray que trois soupes en vin au nom de la Trinité, jusqu’à tant qu’aye fait et accomply le gage. Jean de Chandos offrit là dessus à