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précis des guerres


lettres de remise, qui étoient quelquefois rejetées par la chambre des comptes. L’altération des monnoies acheva d’aliéner au Roi le cœur des peuples. Trahi par des sujets perfides, il devint soupçonneux et cruel ; trop prompt à se venger, il ordonna plusieurs exécutions sans jugement préalable ; en méprisant ainsi les formes de la justice, que les princes ne violent jamais impunément, il intéressa au sort des coupables, et irrita les grands qui craignirent de devenir à leur tour victimes de pareils actes arbitraires. Au moment où il mourut, il avoit perdu l’amour et l’estime de ses sujets. Cependant il avoit rendu d’importans services à la France ; il s’étoit vu à la vérité réduit à abandonner Calais à l’Angleterre ; mais pendant près de vingt années il avoit soutenu la lutte avec avantage contre Edouard, le prince le plus habile de son siècle. Les frais immenses d’une guerre longue et opiniâtre ne l’avoient pas empêché d’acquérir le Dauphiné, le Roussillon, la Cerdagne et la seigneurie de Montpellier. Le Dauphiné lui avoit été vendu par Humbert II, dauphin du Viennois, moyennant cent vingt mille florins d’or ; le Roussillon, la Cerdagne et Montpellier, par Jacques, roi de Majorque, auquel dom Pèdre, roi d’Arragon, fit trancher la tête quelques années plus tard, après s’être emparé de ses États. Humbert, n’ayant point d’enfans, avoit pris la résolution de céder sa principauté à la France, par haine contre Amédée VI, comte de Savoie, auquel il vouloit laisser un voisinage redoutable.

Lorsque Jean II succéda à Philippe de Valois son père [1350], il étoit dans la force de l’âge ; il avoit commandé les armées, et les avait plus d’une fois