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dit : aussi est-il difficile qu’un peuple belliqueux comme le François puisse longuement estre en paix, n’ayant plus d’occasion d’exercer ses armes ailleurs (ce qui est infaillible en matiere d’Estat, que les guerres et occupations estrangeres empeschent les interieures et civiles) ; qui estoit la cause pourquoy le senat romain avoit accoustumé de chercher les guerres estrangeres, et envoyer dehors les esprits les plus remuans, pour obvier aux divisions civiles, selon ce qu’escrit Denys d’Halicarnasse : police autant necessaire en l’Estat, comme de faire une douce purgation et saignée au corps humain, pour le maintenir en santé.

Or, les protestans de France se mettans devant les yeux l’exemple de leurs voisins, c’est à sçavoir, des royaumes d’Angleterre, de Danemarck, d’Escosse, de Suede, de Boheme, les six cantons principaux des Suisses, les trois ligues des Grisons, la republique de Geneve, où les protestans tiennent la souveraineté et ont osté la messe, à l’imitation des protestans de l’Empire, se vouloient rendre les plus forts pour avoir pleine liberté de leur religion, comme aussi esperoient-ils, et pratiquoient leurs secours et appuy de ce costé-là, disans que la cause estoit commune et inseparable. Les chefs du party du Roy n’estoient pas ignorans des guerres advenues pour le fait de la religion ès lieux susdits ; mais les peuples, ignorans pour la pluspart, n’en sçavoient rien, et beaucoup ne pouvoient croire qu’il y en eust une telle multitude en France comme depuis elle se descouvrit, ny que les protestans osassent ou pussent faire teste au Roy et mettre sus une armée et avoir secours d’Allemagne, comme ils eurent. Aussi ne s’assembloient-ils pas seu-