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tuez, et de là il retourna prendre la ville d’Annonay, devant que les huguenots qui estoient dedans en fussent advertis, qui furent fort maltraitez, de tous sexes et âges, l’espace de deux jours ; et la ville fut pillée, tant par les soldats que par les catholiques qui y estoient encore. Mais ayans nouvelle que le baron des Adrets marchoit en diligence pour avoir la revanche, ils troussèrent bagage, et abandonnèrent la ville d’Annonay, après avoir gasté les grains et vivres qui restoient en icelle, de peur que leurs ennemis ne s’en pussent prévaloir.

Le baron des Adrets, estant adverty que Saint-Chaumont s’estoit retiré avec ses troupes, rebroussa chemin et s’en alla pour assiéger la ville de Vienne, où estoit une grande partie des gens et de l’armée du duc de Nemours ; lequel, cognoissant l’humeur du baron, et sçachant qu’il n’avoit pas tant d’affection à la religion des huguenots comme il monstra depuis, qu’à son profit particulier, soit qu’il vist qu’il n’y avoit plus de calices ny reliques à prendre, ou qu’il se faschast de ce party, soit pour acquérir réputation du costé des catholiques, ou bien pour se venger des injures qu’il avoit reçues des huguenots ; le duc le cognoissant pour capitaine, et qui avoit beaucoup de crédit et réputation, pensa que c’estoit le plus seur et expédient pour le service du Roy de le gagner que de le combattre par force ; ce qu’il fit si dextrêment avec belles promesses et douces paroles, comme c’estoit un prince fort persuasif, et qui a toujours sçu attirer les hommes par son gentil naturel, que depuis les huguenots n’ont eu en ce pays-là un plus grand ennemy que ce baron, qui commença dès-lors à pratiquer contre les huguenots ; lesquels, comme fort vigilans en leurs affaires, en