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nier but de la loy n’est point seulement l'observation de la mesme loy, ains le salut et conservation des peuples et des Estats. Et semble mesme que toutes les loix divines tendent à cette fin ; et combien que toutes nos actions doivent butter à la gloire et à l’honneur de Dieu, il est certain que sa puissance, qui est toute parfaite et immuable d’elle-mesme, ne peut estre augmentée par sacrifices ou louanges des plus grands saints, comme elle ne peut diminuer par les blasphesmes des meschans, qui ne sçauroient offencer Dieu de leurs paroles, ains plustost s’offencent et ruinent eux-mesmes. De sorte que tout le bien et le mal que font les hommes n’est que pour les hommes mesmes, et n’en revient rien à Dieu. Aussi voit-on souvent ces mots en la loy divine : Fais cecy ou cela, et il t’en prendra bien ; et si les republiques estoient peries, les loix divines et humaines ne serviroient plus de rien.

Si l’on veut dire que TEstat du royaume de France, n’eust pas esté subverty, quand l’on eust continué les poursuites et condamnations contre les protestans, sans leur permettre le changement de religion, peut-estre est-il vray ; mais neantmoins le royaume n’eust pas manqué de tomber aux dangers ou depuis il a esté, pour avoir pensé bien faire en continuant ces rigueurs contre lesdicts protestans, attendu qu’une grande partie des seigneurs et de la noblesse du royaume tenoient ce party, et favorisoient la religion nouvelle, comme le roy et la reyne de Navarre, le prince et la princesse de Condé, l’Admirai de Chastillon, d’Andelot son frère, colonel de toute l’infanterie françoise, le cardinal de Chastillon, tous frères, et avoient lesdicts protestans le duc de Nemours, pair de France, et le duc de Longue-