Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 33.djvu/126

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voyant qu’elle ne pouvoit demeurer à la Cour ny en France, autrement que comme une jeune douairiere, sans faveur ny credit, ceux de Guise ses oncles luy conseillerent[1] de s’en retourner en son royaume d’Escosse, tant pour asseurer son Estat, et y vivre avec plus d’authorité, se faisant cognoistre à ses sujets, que pour y restablir sa religion, et que par mesme moyen elle s’approcheroit de l’Angleterre, dont elle estoit la plus proche heritiere. Ce que la Reyne mere du Roy trouva fort bon et expedient de s’en defaire.

Surquoy luy ayant esté baillé un grand et honorable douaire, comme le duché de Touraine, le comté de Poictou et autres terres, sans ses pensions, après qu’elle eust faict ses adieux et donné ordre à son partement, un de mes freres fut envoyé à Nantes, pour faire passer à Calais deux galeres de celles que le grand-prieur de France son oncle avoit amenées l’année auparavant de Marseille, èsquelles il entreprit de la faire passer, contre les desseins que l’on disoit que la reyne Elisabeth avoit de la surprendre, ou d’empescher son passage. Mais cette crainte ne l’empescha de s’embarquer à Calais, où elle fut accompagnée fort honorablement jusques au bord de la mer par les ducs de Guise et de Nemours, et plusieurs autres seigneurs et gentils-hommes de la Cour. Et le duc d’Aumale, grand-prieur, general desdites galeres, son conducteur, le marquis d’Elbœuf, le sieur d’Anville[2] à

  1. Ceux de Guise ses oncles lui conseillerent. Marie Stuart se retira d’abord près du duc de Lorraine ; puis elle passa en Écosse, au mois d’aoùt 1561. Tout le monde sait quels furent ses regrets et ses tristes pressentimens, lorsqu’elle perdit de vue les côtes de France.
  2. Le sieur d’Anville. Ce seigneur, l’un des fils du connétable, ai-