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DES MANUSCRITS ARABES.

ne dissimula point qu’il démeloit à travers les politesses du Sultan, l’envie qu’il avoit de le donner en spectacle à son armée. Ce prince étoit d’une belle figure ; il avoit de l’esprit, de la fermeté et de la religion ; ses belles qualités lui attiroient la vénération des Chrétiens, qui avoient en lui une extrême confiance. Quelques historiens ont assuré que l’on avoit enfermé ce prince à Mansoura dans la maison de Lokman, sous la garde d’un eunuque, qui avoit ordre de le traiter avec tous les égards dus à un roi ; d’autres disent qu’il fut conduit au Caire et mis dans la maison de Lokman : ce sentiment me paroît le plus probable.

Touran-Chah, après la bataille, fit massacrer tous les prisonniers ; il ne réserva que les gens d’art ou de métier qui pouvoient lui être utiles : il fit part au gouverneur de Damas de la victoire qu’il venoit de remporter, et lui envoya le bonnet du roi des Français, que ce prince avoit laissé tomber dans la chaleur du combat. Le gouverneur mit sur sa tête ce bonnet, et envoya, à cette occasion, ces deux vers en réponse au Sultan :

Dieu, sans doute, vous destine à la conquête de l’univers, et vous allez marcher de victoire en victoire. Qui peut en douter ? puisque vos esclaves se couvrent déjà des dépouilles que vous faites sur les rois.

Le roi de France resta prisonnier jusqu’à la mort de Touran-chah, qui fut assassiné par les esclaves Baharites. Hussam-Eddin-ben-Ali fut nommé pour traiter avec le prince vaincu ; les conditions furent qu’il rendroit Damiette, et qu’il payeroit la somme de cinq cent mille pièces d’or pour sa rançon et celle de tous