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TABLEAU

pressant le sang-froid et la fermeté d’ame qui sembloient l’élever au-dessus de l’humanité, va presque seul trouver son ennemi dans le château de Lusignan, éloigné de six lieues, lui reproche sa trahison, l’effraie sur les suites, déconcerte pour le moment tous ses projets, et retourne à Paris sans le moindre obstacle. Alphonse resté seul à Poitiers, et ayant reçu des renforts, somma Lusignan de venir renouveler son hommage aux fêtes de Noël. Ce prince, vivement touché des reproches de sa femme, regrettant de s’être laissé intimider par le Roi et de l’avoir laissé échapper, voulut imiter sa hardiesse, et ne montra qu’une audace insensée. Il se rendit à Poitiers, parut devant

Alphonse, et lui déclara qu’il ne le reconnoissoit plus pour son seigneur. Il sortit au milieu de l’étonnement général, fit mettre le feu à la maison dans laquelle il avoit logé, s’élança sur un cheval qu’il avoit fait tenir prêt, et partit comme un éclair.

Louis, instruit des projets du roi d’Angleterre et craignant peu la ligue des autres princes, mit en état de défense les côtes de Bretagne et de Normandie, et rassembla dans la ville de Paris un parlement où Lusignan fut déclaré rebelle. Ensuite il marcha contre ce prince avec une nombreuse armée, et s’empara, sans presque trouver de résistance, de Montreuil en Gastine, de la tour de Berages, de Montcontour et de Fontenay-le-Comte. Lusignan, déconcerté par cette attaque soudaine, n’ayant encore obtenu de ses alliés que de vaines promesses, n’osoit tenir la campagne. Isabelle sa femme conçut alors le projet d’un crime affreux : elle prépara de ses mains un poison subtil. Des scélérats qui lui étoient dévoués furent chargés de