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variantes

ce que tu as plus aimé a manqué à ton besoing[1]

Tandis que le Roy fermoit Sayete, je alai à la messe au point du jour, et il me dit que je l’attendisse, que il vouloit chevaucher ; et je si fis. Quant nous fumes aus chans, nous venimes par devant un petit moustier, et veismes tout à cheval un prestre qui chantoit la messe. Le Roy me dit que ce moustier estoit fait en l’onneur du miracle que Dieu fist du dyable que il geta hors du cors de la fille à la veuve femme ; et il me dit que se je vouloie, que il orroit léans la messe que le prestre avoit commenciée ; et je li dis que il me sembloit bon à fère. Quant ce vint à la pèz donner, je vi que le clerc qui aidoit la messe à chanter estoit grant, noir, mègre et hériciés, et doutai[2] que se il portoit au Roy la pèz, que espoir c’estoit un assacis[3], un mauvèz homme, et pourroit occirre le Roy. Je alai prenre la pèz au clerc, et la portai au Roy. Quant la messe fu chantée et nous fumes montez sus nos chevaus, nous trouvames le legat aus champs, et le Roy s’approcha de li et m’appella, et dit au legat : « Je me pleing à vous dou seneschal qui m’apporta la pèz, et ne voult que le povre clerc la m’aporta.» Et je diz au legat la roson pourquoy je l’avoie fait ; et le legat dit que j’avoie moult bien fèt. Et le Roy respondi : « Vraiement non fist ; grant descort y ot d’eulz deuz, et je en demourai en pèz[4].» Et ces nouvelles vous ai-je contées, pource que vous véez la grant humilité de li.

  1. Édition de Poitiers.
  2. Et doutai : et je craignis.
  3. Que espoir c’estoit un assacis : que peut-être c’étoit un assassin.
  4. En pèz : il faut peut-être lire sans pez, on paix, eu sous-entendant pendant la dispute du senechal et du clerc.