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histoire

« Levez sus, sire chevalier, vous ne vous devez mie agenouller quant vous portez de saintes reliques.» Lors mon chevalier lui dist que ce n’estoient pas reliques, mais que c’estoient camelotz que je lui envoioie. Quant la Royne et ses demoyselles entendirent que ce n’estoient pas reliques, elles se prindrent à rire. Et la Royne dist : « Sire chevalier, mau jour soit donné à vostre seigneur, quant il m’a fait agenouller devant ses camelotz.»

Tantoust après, le Roy estant à Sajecte eut nouvelles que madame sa mere estoit morte. Dont il mena si grand deul, qu’il fut par deux jours en sa chambre sans qu’on peust parler à lui. Et aprés deux jours passez, il m’envoia querir par ung de ses varletz de chambre. Et quant je fu devant lui, il s’escria en me estandant ses braz, disant : « Ha ! Senneschal, j’ay perdu ma mere.» Et je lui dis : « Sire, je ne m’en esbahis point ; car vous savez qu’elle avoit une fois à mourir. Mais je m’esmerveille du grant et oultrageux deul que vous en menez, vous qui estes tant sage prince tenu. Et vous savez bien, fis je, que le sage dit que le mesaise que le vaillant homme a en son cueur ne lui doit apparoir au visage, ne le donner à congnoistre. Car celui qui le fait, il donne grant joie au cueur a ses ennemys, et en donne courroux et malaise à ses amys.» Et lors je l’appaisay ung peu. Et adonc il fist faire oultre mer tant de beaux services pour l’ame de la feuë bonne dame sa mere. Et aussi envoia il en France ung grant sommier chargé de pierres precieuses et joiaulx aux eglises de France, avecques lectres missives,