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de saint loys.

gens de son conseil dessus nommez telles parolles de moy, pour ce que lui avois conseillé contre leur opinion qu’il demourast, et que ainsi ne s’en devoit-il retourner en France. Lors me fist appeller le Roy, et tantoust allé à lui, et me gecté à genoulz devant lui : et il me fist lever et seoirs. Et quant je fu assis il me va dire : « Senneschal, vous savez bien que j’ai tousjours eu fiance en vous, et vous ay tant aymé ; et toutesvois mes gens m’ont rapporté, que vous estes si dur, qu’ilz ne vous pevent contenter de ce qu’ils vous promectent de gaiges, comment en va-il ? » Et je lui responds : « Sire, je ne sçay qu’ilz vous rapportent. Mais quant est de moy, si je demande bon salaire, je n’en puis mais. Car vous savez bien que quant je fu prins sur l’eauë, alors je perdy quanque j’avoie[1], sans qu’il me demourast autre chose que le corps : et par ce ne pourrois-je entretenir mes gens o peu de chose.» Et le Roy me demanda combien je vouloie avoir pour ma compagnie jusques au temps de Pasques qui venoient, qui estoient les deux pars de l’année. Et je luy demanday deux mille livres. « Or me dictes, fist le Roy : avez vous quis nulz chevaliers[2] avecques vous ? » Et je lui dis : « Sire, j’ai fait demourer messire Pierre du Pontmolain, lui tiers à banniere, qui me coustent quatre cens livres.» Et alors compta le Roy par ses doigts, et me dist :

« Sont, fist-il, douze cens livres, que vous cousteront voz chevaliers, et gensd’armes.» Et je lui dis : « Or regardez donques, Sire, s’il ne me fauldra pas bien

  1. Quanque j’avoie : tout ce que j’avois.
  2. Avez vous quis nulz chevaliers : avez-yous cherché, engagé quelques chevaliers.
2.
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