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de saint loys.

Aussi lui faillit compter comme j'avoie esté prins sur l’eauë, et comment ung Sarrazin m’avoit saulvé la vie. Et me disoit le Roy que grandement estoie tenu à Nostre Seigneur quant il m’avoit délivré de si grans perilz. Et entre autres choses le bon saint Roy plaignoit à merveilles la mort du conte d’Arthois son frere. Ung jour demanda que faisoit le conte d’Anjou son frere, et se plaignoit qu’il ne lui tenoit autrement compaignie ung seul jour, veu qu’ilz estoient en une gallée ensemble. Et on rapporta au Roy qu’il joüoit aux tables avecques messire Gaultier de Nemours. Et quant il eut ce entendu, il se leva, et alla tout chancellant, pour la grant feblesse de maladie qu’il avoit. Et quant il fut sur eulx, il print les dez et les tables, et les gecta en la mer, et se couroussa tres-fort à son frere, de ce qu’il s’estoit si toust prins à jouer aux dez, et que autrement ne lui souvenoit plus de la mort de son frere le conte d’Arthois, ne des perilz desquelz Nostre Seigneur les avoit délivrez. Mais messire Gaultier de Nemours en fut le mieux paié ; car le Roy gecta tous ses deniers, qu’il vit sur les tabliers, après les dez et les tables en la mer[1].

Cy endroit veulx-je bien racompter aucunes grans persecucions et tribulacions qui me survindrent en Acre, desquelles les deux en qui j’avoie parfaicte fiance, me délivrèrent : ce furent Nostre Seigneur Dieu et la benoiste Vierge Marie. Et ce di-ge affin de esmouvoir ceulx qui l’entendroit à avoir parfaite fiance en Dieu, et pacience en leurs adversitez et tribulacions ; et il leurs aidera ainsi qu’il a fait à moy par

  1. Voyez les variantes.