Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 2.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moy, jusques hors l’ost, courir sus aux Sarrazins. Mais tantoust que messire Jehan de Beaumont eut ouy ma requeste, il s’escria moult fort, et me commanda de par le Roy que je ne fusse si hardy issir de mon herbergier [1] jusques à ce que le Roy me le commanderoit. Vous devez savoir que avecques le Roy y avoit huit bons chevaliers et vaillans qui avoient eu et gaigné maintesfoiz le pris d’armes tant decza la mer que oultre mer, et les souloit-on[2] appeller les bons chevaliers. D’entre lesquelz y estoient messire Geffroy de Sargines, messire Mahom de Marby, messire Phelippe de Nantuel, messire Ymbert de Beau-jeu connestable de France : lesquelz n’estoient mie là à ce jour, mais estoient aux champs hors de l’ost, et aussi le maistre des arbalestriers avecques grande quantité de gens d’armes, pour garder que les Turcs ne approuchassent de nostre ost. Et advint que messire Gaultier d’Entrache se fist armer à point, et bailler son escu et sa lance, et monta à cheval : et tantost fist lever le pan de son paveillon, et feroit des esperons courant contre les Turcs. Et ainsi qu’il partit de son paveillon tout seullet, fors un sien homme nommé Castillon, son cheval le gette par terre tout estendu, et s’enfuit son cheval tout couvert de ses armes vers noz ennemis. Pour ce que la pluspart des Sarrazins estoient montez sur jumens, pour ceste cause le cheval ala vers eulx courir aux jumens. Et oy dire à ceulx qui disoient l’avoir veu, que quatre Turcs vindrent au seigneur d’Entrache qui gisoit à terre : et en passant et rapassant par devant lui, lui donnerent de grans

  1. Issir de mon herhergier : sortir de mon quartier.
  2. Et les souloit-on : et on avoit coutume.