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TABLEAU

faire prisonnière. Ce fut dans cette circonstance qu’elle mit au monde un fils auquel elle donna le nom de Tristan, pour conserver le souvenir des malheurs qui avoient entoure son berceau.

Louis prisonnier n’avoit conservé que son bréviaire, qu’il lisoit aussi tranquillement que s’il eût été dans l’oratoire de son palais. Privé de tout, il excitoit l’admiration des Sarrasins par sa bonté, sa patience et sa douce résignation. Plusieurs chevaliers, pouvant encore disposer de sommes considérables, vouloient se racheter séparément, sans s’inquiéter du sort de leurs compagnons d’infortune. Il les en empêcha. « Laissez-moi, leur dit-il, le soin de vous délivrer tous. Je vous promets que je ne quitterai point ma prison, si je ne fais sortir tous ceux qui sont venus ici avec moi ».

Il traita de sa rançon et de celle des Chrétiens avec le Sultan ; mais au moment où l’accord étoit terminé, Almoadan, qui s’étoit aliéné les principaux officiers de son armée, fut assassiné par eux. En lui finit la race des Aioubites, ou enfans de Job, dont Saladin fut le premier prince, et qui avoit duré quatre-vingt-deux ans. Le règne des Mamelucks, chefs de la révolution, commença. C’étoit des esclaves mahométans et chrétiens que Meleck-Sala avoit formés dès leur enfance au métier de la guerre, et qu’il avoit eu l’imprudence d’élever aux premiers emplois. Un Mameluck apporta au Roi le cœur d’Almoadan. « Que me « donneras-tu, lui dit-il, pour t’avoir délivré d’un « ennemi qui t’eût fait mourir s’il eût vécu » ? Louis ne répondit pas. « Choisis, poursuivit le Musulman, de me faire chevalier ou de mourir. — Fais-toi