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[1206] de la conqueste

tirer à Rusium le petit pas, pour avec l’ayde de Dieu se mettre en seureté. Mais les Comains, les Valaches et les Grecs du pays, qui estoient en grand nombre, vinrent charger à toute bride l’arriére-garde, que la trouppe de Thierry de Los seneschal de Romanie, qui s’en estoit retourné à Constantinople, faisoit lors sous la conduite de Vilain son frere. Ils les pressérent si rudement, leur blessans plusieurs de leurs chevaux, que de vive force ils les renversérent, avec cris et clameurs, sur la trouppe d’André d’Urboise et de Jean de Choisy, qui les soustinrent neantmoins quelque temps, bien qu’avec peine ; mais les autres se renforçans les contraignirent de gagner le bataillon de Thierry de Tenremonde connestable, et tost aprés les poussérent dans celuy que Charles de Fresne conduisoit. Aprés avoir esté ainsi travaillez ils arrivérent à demie lieuë de Rusium, où les ennemis qui le poursuivoient sans relâche les pressérent plus que devant, et donnérent plus fortement sur eux, leur blessans nombre d’hommes et de chevaux ; et enfin, comme Dieu souffre quelquefois de semblables aventures, les enfoncérent et achevérent de deffaire, ayant cét avantage d’estre legerement armez et montez, où les nostres l’estoient pesamment.

213. Helas ! que cette journée fut funeste à la chrestienté, des six vingt chevaliers n’en estans eschappez que dix au plus, tous les autres ayans esté tuez ou faits prisonniers. Ceux qui se sauvérent vinrent à Rusium, et se ralliérent avec ceux qui y estoient demeurez. Thierry de Tenremonde, Olis de l’Isle brave chevalier et vaillant, Jean de Sompone, André d’Urboise, Jean de Choisy, Guy de Conflans, Charles de Fresne,