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LA RENAISSANCE

favoriser l’impression correctes des livres grecs. Cependant « des hommes distingués dans les lettres nous ont représenté que les arts, l’histoire, la morale, la philosophie et presque toutes les autres connaissances découlent des écrivains grecs, comme les ruisseaux de leurs sources  ». Pour répandre à profusion, par des impressions correctes, ces livres grecs « source de toutes instructions ». le roi confiait un privilège royal pour les impressions grecques à Conradd Néobarar : sans autre vue en ce faisant, que l’intérêt des lettres. Il voulait que son royaume ne le cédât à aucun autre «  pour la solidité donnée aux études, pour la faveur accordée aux gens de lettres, et pour la variété et l’étendue de l’instruction ; afin que la jeunesse studieuse, connaissant notre bienveillance pour elle et l’honneur que nous nous plaisons à rendre au savoir, se livre avec plus d’ardeur à l’étude des lettres et des science ; et que les hommes de mérite, excités par notre exemple, redoublent de zèle et de soin pour former la jeunesse à de bonnes et solides études. » C’était là un noble langage, en grande partie nouveau sur les lèvres des rois. Il témoigne que le prince et ses conseillers avaient pleine conscience des besoins de leur temps, et des devoirs que leur imposait cette passion pour l’étude, qui est la marque et l’honneur du XVIe siècle, lui-même était fier de ce rôle qu’il avait adopté de monarque ami des lumières ; et parfois, le prix qu’il attachait à cette gloire, lui-même l’a déclaré avec une ostentation qui semble mieux convenir aux habitudes de cour du XVIIe siècle et du XVIIIe siècle qu’à l’humeur libre du XVIe siècle : il s’était fait peindre à Fontainebleau, dans une vaste fresque, ouvrant la porte du temple des Muses, à une foule d’hommes et de femmes, qui, les yeux bandés, se dirigeaient à tâtons, vers l’asile de lumière où le roi les appelait. « Par cet emblème, dit un vieil historien, on peut voir le soin qu’a pris cet illustre monarque à chasser l’aveuglement de l’ignorance, qui estoit de son temps[1]. » Celui qui écrivait ces lignes, en 1612, était un moine mathurin, le Père Dan. Soixante-dix ans plus tard, Fénelon écrivait encore[2] (en 1714) : « Nous sortons à peine

  1. Le Père Dan, mathurin. Trésor des merveilles de la maison royale de Fontainebleau. 1642. in-folio.
  2. Lettre à La Motte. 4 mai 1714.