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similitude presque complète et là ces divergences fondamentales ?

Il y a plus. Nous ne possédons malheureusement qu’un petit nombre de lignes de gaulois. Mais elles disent assez — même celles qu’il a été possible d’interpréter — que latin et gaulois faisaient deux, et étaient irréductibles l’un à l’autre[1]. Sur certains points particuliers nous avons des données sûres et nous savons que les deux langues étaient en contradiction absolue. J’en donnerai un seul exemple : Le gaulois avait un p à l’initiale, là où le latin avait un q (= k) ; pempe = quinque (cinq) ; *petvares (qu’on retrouve dans petor-ritum, char à quatre roues) = quatuor (quatre), etc. Or c’est le q et non un p que le français a conservé. Comment et pourquoi serait-il d’accord avec le latin, si nous parlions gaulois ? Quand le q aurait-il reparu, et sous quelle influence la règle de la phonétique latine eût-elle prévalu sur l’autre ?

Non, il est peu sage de faire, à l’exemple de quelques-uns, de cette question historique une question nationale. Il n’y a ni à s’en vanter, ni à s’en défendre ; comme les Italiens, les Espagnols, les Portugais, les Roumains, nous parlons latin ; ce n’est plus une hypothèse, mais la conclusion de toutes les recherches linguistiques poursuivies depuis cent ans.

  1. Voici, à titre de spécimens, deux inscriptions réputées celtiques ; il n’est nullement démontré que la première soit gauloise.

    1o Inscription trouvée à Nîmes (Stokes, Celtic Declension, p, 52) :

    (Γ)ΑΡΤΑΒ :: (Ι)ΛΛΑΝΟΥΙΑΚΟΣ ΔΕΔΕ
    ΜΑΤΡΕΒΟ ΝΑΜΑΥΣΙΚΑΒΟ ΒΡΑΤΟΥΔΕ

    Lisez : (G)artab[os] Illanoviacos dede Matrebo Namausicabo bratude : Gartabos [fils] d’Illanoviax a posé (τίθημι) aux Mères Nîmoises par ordre (?).

    2o Inscription trouvée à Alise (Ib., p. 59) :

    MARTIALIS — DANNOTALI.
    IEVRV — VCVETE — SOSIN
    CELICNON — ETIC.
    GOBEDBI — DVGIIONTIIO
    VCVETIN.
    IN — ALISIIA.

    Lisez : Martialis [fils] de Damotalos a donné (ou consacré) cette stèle (?) pour Ucuetis… Le sens de la suite n’est pas assuré.