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déplorable éducation qu’on lui donne, ferait plus tard une femme charmante !

Jacques tira une bouffée de sa cigarette et proféra, candide :

— On la déprave ? Comment cela ? Tu as des idées bien perverses ! C’est une enfant, cette pauvre Cady ! et elle n’entend pas plus malice que nous.

Deber fit un geste et prononça sèchement, mécontent de s’être laissé aller à une morale bien inutile en ce lieu :

— Mettons que je n’aie rien dit.

Valentin, le valet de chambre, venait d’entrer, et, tout en rangeant les tasses à café, il glissa à l’oreille de Cady :

— Méfiance !… Y a une gonzesse qui réclame après son homme… On va venir par ici… Faudrait calter…

Aussitôt la fillette disparut comme une souris.

Mais, au lieu de regagner sa chambre, elle courut à l’office, où elle avala goulûment le champagne mis en réserve par Valentin.

Elle avait une indicible sensation de malaise physique et moral ; tout son être était enfiévré, écœuré, profondément intoxiqué.

Elle avait envie de mordre, de pleurer, de crier, surtout d’être étreinte par des bras puissants et cruels, jusqu’à l’évanouissement.

Dans la petite pièce vide, souffrant follement de sa solitude, elle se précipita à genoux, les coudes sur le siège d’une chaise où traînaient des torchons, et, les mains sur son visage, elle éclata en sanglots brefs et colères, évoquant l’image de Maurice Deber, qu’elle invectiva tout haut avec haine.

— Méchant !… brute !… imbécile !…

La voix de Valentin la tira brusquement de son délire rageur.

— Eh bien ! vous voilà dans un joli état !… Qu’est-ce qu’ils vous ont donc fait, là-bas ?…