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Et, pesant sur l’épaule de l’Anglaise, il la fit se rasseoir.

— Crie : Vive la France ! » et qu’il n’en soit plus question.

Sans prêter attention au tumulte, Clémence, la cuisinière, tout en sirotant du bourgogne auquel elle ajoutait un petit verre de cognac, déversait dans le sein du concierge, qui ne l’écoutait que de temps à autre, ses rancœurs et ses ressouvenirs :

— Treize ans que je suis dans la maison, monsieur, cela peut compter !… Et vous pourriez croire qu’on a des égards ?… Pas le moindre ! J’en suis encore à exiger un congé pour revoir ma famille qui s’a éteinte sans que j’assiste jamais à aucun enterrement. Mais je suis trop bonne, et ce serait à croire que « Julienne » a le mauvais œil, tant elle m’interloque… Et pourtant, Dieu sait si je pourrais marcher dessus et lui faire baisser les yeux !… Vous pensez si j’en sais long… et le pourquoi et le comment de toutes choses !… Une créature qui a fait la vie autrefois, pire qu’une traînée ! Mais quoi, ça avait le sac et tous ces salaupiauds se traînaient à genoux devant elle !… Après la noce, ne croyez pas qu’elle se soit refroidie de suite… Et la grande qui est là ne sort pas de la fabrique du mari, je vous l’affirme !… Une histoire pas propre… Un petit jeune homme que le mari s’en servait pour ses élections, pendant que la femme s’en régalait… et, un beau jour, je te plaque !… si bien que lui en est devenu loufoque et qu’il a ingurgité une mauvaise drogue dont il a passé !…

Cady, sur laquelle jusqu’alors coulait le verbiage de la cuisinière sans qu’elle parût l’entendre, tourna la tête et ses yeux assombris s’attachèrent avidement sur la bavarde.

Celle-ci poursuivit, buvant toujours son mélange à petits coups, tandis que sa voix s’empâtait peu à peu :