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— Pour le moins.

Émile avertit tout à coup :

— Fermez… Nous arrivons.

À une allure ralentie, l’auto traversa la rue d’un village, puis fila pendant quelques minutes le long de propriétés aux murs moussus, surmontés de vieux arbres fort élevés. De temps en temps, une grille ou une ouverture aménagée dans la clôture laissait voir une échappée de pelouses semées de feuilles mortes, de corbeilles vides, d’arbustes soigneusement empaillés pour la rude saison.

L’auto stoppa devant une lourde porte cochère encastrée dans un haut mur sur lequel retombaient les branches dépouillées de frênes pleureurs et d’acacias.

Émile fit deux ou trois fois résonner la trompe. Les deux battants de l’entrée s’ouvrirent en silence ; il lança rapidement sa machine dans une allée qui contournait une pelouse.

Cady aperçut une vieille bonne à l’air revêche, qui se hâtait de clore la grand’porte, comme si elle l’eût refermée sur un scandale vivant. Puis, elle se vit devant un perron de pierre occupant toute la façade de l’habitation, beaucoup trop grandiose pour la maison à un seul étage, banale, couronnée d’un maigre toit d’ardoises.

La porte centrale s’ouvrit précipitamment, et le propriétaire du lieu parut. Cady retint à grand’peine un rire devant cette silhouette falote de petit homme court et ventru.

Une énorme chaîne d’or brimqueballant sur sa panse, il dégringolait les degrés, l’œil inquiet, la lèvre tremblotante, la figure glabre comme son crâne.

— Madame la baronne, vous me voyez confus de l’honneur que vous me faites en venant me visiter, bégaya-t-il à demi prosterné en ouvrant la portière de l’auto.

— Ne me parlez pas ! Je suis excédée, furieuse !