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reproche rien, non plus !… Seulement, pas de rouspétance !…

Un étrange énervement gagnait Mlle Armande, fait de rage, de mortification, de sourdes rancœurs, de ressouvenirs pénibles, de déceptions et d’effrois obscurs du futur. À demi vêtue, elle se laissa choir sur une chaise, les coudes sur la table, le front dans ses mains, et sanglota.

— Ah ! la vie est vraiment trop dure ! s’écria-t-elle avec un désespoir plein de colère.

Elle venait de penser au cadeau encore à venir de son patron, et qui ne solderait peut-être même pas les frais de toilette exigés par le rendez-vous. Elle se rappelait les grossières caresses, l’air de désinvolture et de raillerie grivoise de l’homme ; ses plaisanteries obscènes, son indifférence, son détachement après le pitoyable amour, son manque d’égards les plus élémentaires. Et voici que, par surcroît, cette incompréhensible et terrifiante enfant avait tout deviné, la menaçait, tiendrait perpétuellement en suspens au-dessus de sa tête le scandale, l’ignominieux renvoi !…

Cady semblait à cent lieues de son institutrice.

Affairée, chantonnant, se parlant à elle-même tout haut, elle trottait dans la chambre, se livrait à mille mimiques impayables pour elle seule, pour son image que lui renvoyaient les glaces et à qui elle dédiait mille singeries.

Sa toilette expédiée, habillée, elle sortit de la chambre, sans un regard à Mlle Armande, suprêmement vexée de cette attitude.

Elle pénétra dans l’office, où Valentin fumait une cigarette en lisant les journaux, « pour se donner du cœur à l’ouvrage tout à l’heure ».

— Écoute, Valentin, tu vas dire à Maria que je veux parler à maman tout de suite.

Le valet de chambre goguenarda.