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genoux et reprit la feuille où le jeune homme repassait en voiture, à ses côtés.

— Il s’appelait Armand Woechlin. C’était un pauvre fou. Son père possédait l’une des plus importantes fabriques de la contrée. C’était un homme énergique et pratique, très travailleur. Il voulait que son fils lui succédât et prît la suite de ses affaires. Il se heurta à un entêtement contraire. Armand avait horreur de l’industrie, il voulait être poète, auteur dramatique. Il faisait des vers, il entretenait des relations avec des journaux, des sociétés littéraires en cachette de son père. Sans cesse ces deux hommes se choquaient, luttaient, de plus en plus exaspérés l’un contre l’autre. Enfin, un jour, il y eut une explication décisive, fatale.

Elle s’interrompit brusquement, saisit toutes les photographies, les froissa et les précipita dans le feu, où elles s’enflammèrent aussitôt.

Cady poussa un cri sourd et voulut s’élancer.

— Oh ! maman !

Mme Darquet la retint d’une main presque brutale.

— Ah ça, qu’est-ce qu’il te prend ?

Des larmes jaillissaient des yeux de Cady, emplie d’une détresse sans nom.

— Je voulais le revoir ! balbutia-t-elle éperdue.

Sa mère se récria vivement, une colère dans les yeux :

— Es-tu folle ?… À propos de quoi t’intéresses-tu à des gens que tu ne connais pas ?

Cady, agenouillée sur le tapis, regardait avec désespoir l’image de l’inconnu, qui achevait de se consumer. Pourtant, attentive à dissimuler son émotion, elle prononça avec une apparente indifférence :

— Cela m’amusait de regarder ces photographies.

Mme Darquet lui tendit le porte-cartes vide.

— Remets cela à sa place.

Et, se levant, avec un geste énervé, elle intima :