Mlle Armande répondit, humiliée :
— Peu de chose, monsieur… Mais je tenais à entrer dans votre maison.
— Combien ?… insista-t-il, impatient.
— Quatre cents francs par mois.
Il se récria :
— Mais c’est miteux !… Véritablement, je ne comprends pas Mme Darquet et je lui dirai…
Mlle Armande protesta avec vivacité :
— Non, monsieur, je vous en supplie !… J’ai accepté les conditions de Mme Darquet, et il me serait aussi pénible que nuisible qu’elle pût croire que je me suis plainte à vous !…
Le député hocha la tête.
— Vous avez raison…
Et, faussement paternel :
— Eh bien ! ma petite, je ne vois qu’un moyen, c’est d’augmenter moi-même votre traitement… sans en parler à Mme Darquet qui, en effet, pourrait se froisser de mon intervention… Oh ! ne protestez pas !… Je trouve votre indemnité tout à fait mesquine, et je tiens à réparer une simple erreur… Chaque fin de mois, vous passerez à mon cabinet, rue Laffite, et je vous réglerai la petite différence.
Un peu pâle, Mlle Armande murmura confuse :
— En vérité, monsieur, je ne sais si je dois accepter…
Il la regarda fixement.
— Est-ce que je vous fais peur ?… Ça vous déplairait de me devoir un peu de reconnaissance ?
Elle sentait que toute sa vie, tout son avenir se décidaient en cet instant. Et c’était en elle un violent tiraillement.
Refuser ?… Oh ! comme elle aurait voulu pouvoir cracher au visage de ce gros homme luxurieux un « non » méprisant !… Mais c’était sa situation compromise, perdue !… Sans doute, repoussé, mortifié dans son amour-propre, il se vengerait !…