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— Si vous voulez ôter votre manteau, Cady, je le porterai.

Mais Darquet protesta avec galanterie :

— Du tout !… Qu’elle le porte elle-même !… Vous la gâtez trop !…

Cady fit un brusque crochet, froissée, et les laissa passer en avant dans l’allée sinueuse.

— Allez donc ! Bavardez tous deux et laissez-moi tranquille ! murmura-t-elle, boudeuse.

Et, quittant le sentier, elle marcha sous bois, les yeux attachés sur la terre, cherchant vainement de petites bêtes, quelque vie animale ou végétale sourdant de cette étendue morte ; elle se sentait peu à peu envahie par un inexprimable et poignant sentiment de solitude, de vide et de lassitude.

Là-bas, Cyprien Darquet et Mule Armande causaient, sans s’occuper de la jeune fille. Ayant secoué l’influence de son trop plantureux déjeuner, le député, redevenu correct, se tenait à distance convenable de l’institutrice. Il l’interrogeait par petites phrases brèves, sournoises, pleines de sous-entendus, mais aussi assez vagues pour lui permettre de faire volteface si la jeune personne se montrait revêche et d’une vertu inabordable — ce qui était peu probable.

Il lui semblait tout naturel que cette commensale devînt sa maîtresse, tout au moins momentanément. Et, avec une complète sincérité, il ne mettait pas en doute que sa fille passât ignorante auprès de cette intrigue.

C’était une enfant, incapable de soupçons. Et puis, que diable ! lui-même n’était pas novice, et il savait cacher son jeu. Quant à la petite Poitrinaud, elle avait intérêt à être discrète et elle paraissait une fine mouche… Elle n’était pas jolie, jolie !… mais c’était un petit pruneau qui devait avoir d’agréables surprises, et elle semblait neuve, ou à peu près.

— Comment ? disait-il. Pas d’amoureux ?… Quelle blague !…