Page:Pert - L Autel.djvu/80

Cette page n’a pas encore été corrigée

ves, en même temps qu’il croyait voir les articles du lendemain dans les journaux, le double enterrement, la famille, les amis, les collisions et les grimaces des parents de Suzanne coudoyant les artistes et les journalistes…

Et, soudain, toute cette absurde fantasmagorie s’enfuit, disparut comme dans une trappe, chassée par l’appel réel d’une petite voix faible et plaintive.

— Robert !…

Il se rua vers la porte qu’il lui semblait ne pouvoir franchir tout à l’heure, et traversa vivement la chambre.

Étendue dans son lit, très pâle, très calme, trop calme, Suzanne le regardait d’yeux fixes, dont les prunelles semblaient se déplacer avec difficulté.

Le jeune homme vint s’agenouiller au pied du lit, étreint par une inquiétude sans nom, tant la Suzanne gisant là était peu la Suzanne habituelle.

— Ma chérie ! balbutia-t-il d’une voix étouffée. Tu m’appelais ? Veux-tu quelque chose ?…

Elle tourna lentement les yeux vers lui ; ni sa tête, ni ses deux mains allongées sur le drap n’eurent un mouvement.

— Non, dit-elle.

Sa voix étrange, impersonnelle, acheva de bouleverser Robert.

— Mon Dieu ! Qu’as-tu ? Pourquoi parles-tu ainsi ?… Est-ce que tu souffres ?…

Elle essaya de se soulever un peu, détourna la tête, posa sa joue sur l’oreiller, et prononça plus haut, avec tranquillité :

— Non !

Et, lentement, ses paupières s’abaissèrent, elle s’immobilisa, elle parut endormie — ou morte.

Paralysé, Robert la regardait, partagé entre les doutes les plus atroces et la crainte de tirer la pauvre enfant