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elle tenait sur ses genoux recouverts de toile blanche une précieuse soierie que ses doigts adroits de corsagière ouvrageaient à l’infini.

— Merci.

Et il s’éloigna sans remarquer le long regard fervent qui l’accompagnait.

Que de fois l’on passe ainsi auprès d’un dévouement, d’un amour sincère, que l’on ignorera éternellement et qui sombre dans le néant…

Au rez-de-chaussée, il frappa fortement au battant de la petite porte verte à la sonnette absente. Au bout de quelques instants la voix mélodieuse, un peu grave de l’actrice résonna :

— Qui est-ce ?

— Moi, Castély.

Une exclamation joyeuse ; et, l’accent devenant plus clair, plus juvénile :

— Ah ! vous tombez à pic… Justement, j’avais à vous parler… J’ouvre !… Attendez une toute petite minute que je me sauve, car je suis en chemise…

La clef fut tournée, la porte bâilla ; Robert attendit consciencieusement le temps moral nécessaire pour que la jeune fille regagnât sa chambre, et pénétra dans l’étroit corridor.

Une cuisine de la grandeur d’un placard ; un petit salon servant à l’occasion de salle à manger, tendu d’étoffe vert mousse, et la chambre à coucher dont la portière soulevée ne laissait apercevoir qu’un grand paravent japonais déployé et le haut d’une glace délabrée par l’humidité. C’était tout l’appartement de Madeleine Jaubert, qui y vivait seule, sans amant en titre et sans amie avouée.

Malgré cette singularité, elle était assez aimée dans le cercle social où elle se mouvait. Un étrange monde