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Et, au moment de se retirer, il expliqua :

— Votre interview fera pendant à celle que je viens de consacrer à l’établissement du docteur Julien Dolle, et aux déclarations si curieuses du jeune maître de la chirurgie. Comme vous, il proclame hardiment le droit des humains de procréer à volonté et de limiter leur progéniture par tous les moyens merveilleux dont la science dispose aujourd’hui… Il aura le grand honneur d’avoir largement contribué au remarquable mouvement de l’opinion au sujet de l’avortement… terme et acte qui, naguère, étaient honteux et qui, à présent, prennent leur place dans le langage courant et sont envisagés sans effroi ni réprobation par les personnes les mieux placées dans l’opinion. — Ah ! nous sommes vraiment à une époque admirable et l’on peut dire que le corps humain, dans la main du chirurgien d’aujourd’hui, n’est plus qu’un mannequin soumis et docile !…

Castély hochait la tête avec approbation.

— Évidemment.

Resté seul, il revint à pas lents près de Suzanne, toujours alanguie sur sa chaise-longue. Il était content de cette interview, des paroles qu’il avait prononcées, du retentissement qu’elles ne pouvaient manquer d’obtenir. Il savourait la bouffée d’orgueilleuse satisfaction qui s’épandait en lui.

Il se sentait quelqu’un.

— Mon Dieu, Suzannne, comment peux-tu te complaire dans une pareille obscurité, s’écria-t-il.

Sa voix éclatait joyeusement — un peu trop — dans le silence de la chambre de l’inguérissable malade.

D’un geste impatient, tandis que sa femme le considérait avec une amertume grandissante, il poussa les persiennes demi-closes.

Placé au coin de l’avenue et de la place de l’Alma,