— J’ai été, c’est vrai, fort gâté par la vie et le public, répondit-il avec une charmante modestie.
Un rappel vint au journaliste. — Dites-moi, cher maître, est-ce que vous n’aviez pas un collaborateur pour votre admirable drame ?
Castély fit un geste insouciant et répondit avec une distraction évidente :
— J’ai, en effet, signé ma pièce de l’Odéon avec un ami.
— Un de nos auteurs connus ?
— Non, loin de là !… Un poète de province auquel, grâce à cette collaboration, j’espérais faire entr’ouvrir les portes du second Théâtre-Français… À l’inverse de moi, le pauvre garçon n’a jamais pu percer, malgré un certain talent.
— Bien ! bien ! fit l’autre, édifié. Dans ces conditions, est-il utile que je mentionne son nom à côté du vôtre ?
Robert se consulta.
— Mon Dieu, je ne demanderais pas mieux… Mais je craindrais que ce rappel lui fût pénible… Sa collaboration fut si insignifiante, et, depuis, il essuya tant de déboires…
Le journaliste biffa une ligne commencée. — Alors, supprimons. Maintenant, parlez-moi un peu de votre future pièce… Est-elle pour l’Odéon ou pour la Comédie-Française ?… Qui seront ses principaux interprètes ?
Castély sourit avec mystère.
— Cela, mon cher monsieur, il m’est totalement interdit de vous le dire, jusqu’à nouvel ordre.
L’autre supplia. — Pourtant ?
— Non ! non ! n’insistez pas, ce serait absolument inutile !
— Cependant, vous me permettrez de donner là-dessus mes renseignements personnels ?