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allait se jeter à la Seine, en ajoutant qu’elle me demandait bien pardon pour le chagrin qu’elle allait me causer, et m’avertissant d’aller la réclamer à la Morgue, afin que son corps n’y soit pas exposé trop, longtemps. Moi, sa mère, j’ai dû lire cela, monsieur. Mon sang n’a fait qu’un tour… j’ai été éblouie et je suis tombée là, par terre… que je ne sais pas comment mon crâne ne s’est pas trouvé fendu de par ma chute Et, quand je suis revenue à moi, j’avais toujours le papier serré dans ma main. Les voisines qui me soignaient m’ont cru folle, lorsque je me suis écriée que je voulais aller reconnaître le cadavre de ma fille là-bas, à la maison des noyés… et il paraît que je suis retombée plusieurs fois, les sentiments perdus… Pendant tout cela, la nuit était venue. On finit par me céder… On amène un fiacre… Il y avait un cheval blanc… et ça a été pour moi le dernier coup, car les animaux de cette couleur ont toujours conduit le malheur pour moi… À la Morgue, porte fermée… et les agents me bousculent : « Demain matin », qu’ils me disent. Ah ! monsieur, quelle nuit !… Et, l’on parle des enfers ?… Monsieur, je vous réponds qu’il y en a qui les ont connus sur terre !… J’avais renvoyé les personnes qui m’accompagnaient… J’aurais battu, assassiné, ceux qui me disaient de bonnes paroles… Pensez donc !… Ne pas savoir au juste si sa fille est morte ou vivante !… Si la rivière la roule, on ne sait où !… Ou si elle souffre, échouée quelque part, le souffle pas encore envolé !… Des fois, je m’imaginais qu’elle n’avait pas eu le courage de mourir… J’espérais la retrouver vivante… Un moment, l’idée poussa en moi qu’elle était justement en train de revenir à la maison, pendant que je rôdais inutilement aux environs de cette Morgue, où, bien sûr, elle ne se trouvait pas… Oui, une idée si forte qu’il me semblait que je voyais Cécile dans la nuit de la rue, que j’en-