Page:Pert - L Autel.djvu/22

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’heure présente faisaient plus émue, plus chaude que naguère.

La perspective d’un sentier fuyant au milieu du bois tenta soudain Suzanne.

— Si nous marchions un peu ?

Robert acquiesça immédiatement.

— Je congédie la voiture, nous reviendrons par le Métro…

Dès qu’il la rejoignit, elle se pendit à son bras, et ils marchèrent épaule contre épaule, intimement heureux de ce contact, quoiqu’il leur fut très difficile de cheminer ainsi réunis, car la voie était étroite, inégalement mangée par l’herbe, les ronces et les broussailles. Pendant qu’ils avançaient, des branches inclinées frôlaient leur visage, se balançant longtemps après leur passage ; d’autres s’agrippaient à leur vêtement, pour l’abandonner aussitôt, comme des mains timides et effrontées aussi de petits mendiants. Ils avaient l’obscure sensation de traverser une persistante et amoureuse caresse venant des choses…

Comme c’est déjà vert ! s’extasia Suzanne.

Tout renaissait pour cette vie éphémère des champs et des bois proches des grandes villes, à la fraîcheur condamnée d’avance, que fripent trop de passants, qu’obscurcissent et souillent si promptement la poussière et la fumée. Les écorces lavées par une pluie récente, distendues par une brusque poussée de sève, s’écartaient pour laisser poindre de fragiles et hardis bourgeons ; les taillis frissonnaient, illuminés de soleil ; les herbes molles se dressaient en minuscules lames duvetées, d’une uniforme teinte crue ; les chèvrefeuilles se suspendaient aux branches, tiges de bois mince, gris, aux ondulations serpentines, sur lesquelles s’épanouissaient des bouquets de jeunes pousses veloutées ; une senteur de feuille morte et de verdure écrasée fluait, par