Page:Pert - Charlette.djvu/79

Cette page n’a pas encore été corrigée

lui demeurait visible, et, dans le flot des admirations qui maintenant coulait sans qu’il eût besoin de le provoquer ou de le solder, il n’apercevait, clair- voyant, que l’habitude contractée, l’intérêt caché, ou le snobisme.

Il avait voulu le triomphe, à tout prix, et l’avait conquis. Mais, il en jouissait sceptique, ulcéré, mesurant avec amertume le peu de valeur des gloires humaines qui ne sont élevées que sur d’habiles combinaisons, la vénalité des consciences et la bêtise du plus grand nombre.

Ce soir-là encore, parcourant d’un rapide coup d’œil la scène et la salle, il analysait sa pièce et les spectateurs. — Critique impitoyable, il jugeait « Petite amoureuse » une œuvre mièvre, d’une fausse originalité, mal bâtie scéniquement, dont tout le succès reposait sur le chatouillement inavouable des sensualités qu’elle éveillerait en les spectateurs, tout en conservant un style, une apparence assez chastes pour que l’hypocrisie du public put ne point s’en choquer. Il avait sciemment construit son drame ainsi, en connaissant tous les défauts artistiques, et passant outre, voulant le succès et l’argent moins par cupidité que pour satisfaire la seule ambition qu’il eut voir sa volonté s’accomplir. Il jouissait, non pas du succès précisément, car il en savait trop bien la source basse, mais d’avoir su nettement découvrir ce qui séduirait le public ; il savourait son